Par un arrêt du 12 juin 2025, rendu dans le sillage de la saga Commisimpex, la Cour de cassation précise le régime probatoire applicable lorsque l’État débiteur invoque l’affectation diplomatique d’un immeuble frappé d’une mesure d’exécution. L’arrêt éclaire l’articulation délicate entre protection des missions diplomatiques et effectivité du droit à l’exécution, dans un paysage déjà reconfiguré par la loi Sapin 2.
Saisie d’un commandement valant saisie immobilière dirigé contre des biens de la République du Congo, la Cour consacre une présomption d’affectation diplomatique : la seule allégation par l’État que l’immeuble abrite la résidence de l’ambassadeur ou un service de la mission diplomatique suffit, sans exigence d’indices matériels tels qu’un drapeau, un emblème ou une signalétique. Cette approche, cohérente avec la logique de la Convention de Vienne qui fonde les immunités sur leur finalité fonctionnelle, privilégie la continuité de l’action diplomatique plutôt que l’apparat des signes extérieurs.
La présomption n’est toutefois pas irréfragable. Le créancier peut la renverser en produisant une réponse du service du protocole du ministère des Affaires étrangères établissant l’absence de déclaration ou d’autorisation d’affectation, notamment pour des bureaux situés hors de la localité de la mission. Consciente des obstacles pratiques, la Cour ouvre une voie pragmatique : en cas de difficulté, le juge de l’exécution peut être saisi afin de solliciter directement cette réponse. En l’espèce, ce mécanisme a permis de faire échec à l’affectation diplomatique alléguée pour un immeuble.
La décision introduit par ailleurs le principe d’« unicité du statut immobilier » : lorsqu’une exemption fiscale est accordée sur le fondement de l’article 23 de la Convention de Vienne, l’affectation diplomatique est tenue pour établie et entraîne automatiquement inviolabilité, protection, exonération et insaisissabilité. Il n’est donc pas possible d’admettre l’un (l’exonération) tout en refusant l’autre (l’insaisissabilité), ce qui créerait une insécurité juridique que la Cour entend éviter.
En pratique, la décision commande aux créanciers d’anticiper : diligenter sans délai une demande formelle auprès du protocole, consigner les relances, saisir le juge de l’exécution en cas de silence, et cartographier d’autres actifs potentiellement saisissables (biens non diplomatiques, créances commerciales, comptes d’entités distinctes, autres forums d’exécution). Pour les États, le message est clair : l’allégation d’affectation offre une protection efficace, mais elle oblige à la cohérence, notamment fiscale.