DISPUTE RESOLUTION BOUTIQUE

Précisions sur l’articulation entre la Convention de Vienne du 11 avril 1980 sur la vente internationale de marchandises et le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux

L’assureur d’une société italienne, subrogée aux droits de celle-ci, a assigné une société française et son assureur en responsabilité pour livraison d’ingrédients alimentaires défectueux et non conformes, lesquels devaient ensuite être intégrés par la société acheteuse à ses propres produits.

Par un arrêt en date du 21 octobre 2021 (RG 20/04472), la Cour d’appel de Versailles a fait droit aux demandes de l’assureur et a retenu la responsabilité de la société défenderesse sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux, après avoir relevé qu’aucune responsabilité sur le fondement de la Convention sur la vente internationale de marchandises (la « CVIM »), pour défaut de conformité de la marchandise, ne pouvait lui être imputée du fait de l’exonération prévue à l’article 79.

Pour mémoire, l’article 79 de la CVIM prévoit qu’: « [u]ne partie n’est pas responsable de l’inexécution de l’une quelconque de ses obligations si elle prouve que cette inexécution est due à un empêchement indépendant de sa volonté et que l’on ne pouvait raisonnablement attendre d’elle qu’elle le prenne en considération au moment de la conclusion du contrat, qu’elle le prévienne ou le surmonte ou qu’elle en prévienne ou surmonte les conséquences ».

Aux termes de son pourvoi, la société française faisait valoir l’impossibilité de retenir sa responsabilité sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux, dès lors que la Cour avait estimé que sa responsabilité ne pouvait pas être engagée sur le fondement de la CVIM.

Ainsi, il appartenait à la Cour de cassation de déterminer s’il était possible de retenir la responsabilité de la société française sur le fondement délictuel de la responsabilité du fait des produits défectueux, dans la mesure où aucune responsabilité sur le fondement de la CVIM ne pouvait lui être imputée.

La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel. Après avoir rappelé le champ d’application de la CVIM, la Cour rappelle qu’il résulte des dispositions de cette dernière que dès lors que les parties n’ont pas entendu exclure son application, les questions expressément tranchées par celle-ci doivent être exclusivement réglées par ses stipulations.

La Cour relève, d’une part, que le différend portait sur des dommages causés aux biens d’une société ayant son établissement en Italie par la livraison, par sa cocontractante ayant son établissement en France, de marchandises dont le type ne correspondait pas à celui qui était prévu au contrat, et que d’autre part, que les parties n’avaient pas exclu l’application de la CVIM.

Par conséquent, les conditions de mise en œuvre de la CVIM étaient en l’espèce réunies, et ses dispositions devaient régir de manière exclusive la question de la responsabilité du vendeur. Dans la mesure où la société française bénéficiait de l’exonération prévue à l’article 79, sa responsabilité ne pouvait être recherchée sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux.

Cette solution ne fait pas l’unanimité parmi la doctrine, dans la mesure où l’application de la CVIM à un contrat de vente est supplétive de volonté alors qu’il est interdit de déroger au régime de responsabilité des produits défectueux (article 1245-14 du Code civil) et que ce régime pourrait d’ailleurs s’appliquer à une réclamation d’un sous-acquéreur des produits en cause.

Cass. civ. 1, 17 mai 2023, n° 22-16.290 

 

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